Le Vendée Globe, l’Everest pour tous ; par Antoine-Marie Izoard

Ceux de vos auditeurs qui y ont pris goût le savent… depuis l’arrivée mi-janvier du vainqueur du Vendée Globe, Charlie Dalin, les concurrents continuent d’arriver au compte-goutte aux Sables-d’Olonne. Ils sont rincés par leur périple en solitaire d’au moins 45 000 kilomètres passé par le cap de Bonne-Espérance, les mers australes, le tour complet de l’Antarctique ou encore le mythique cap Horn. À l’arrivée de chaque concurrent dans le chenal du port vendéen, la foule est au rendez-vous, comme elle était présente en masse au départ de la course trois mois plus tôt.

La joie des colocs Lazare

Il suffisait de voir par exemple, mardi, la joie explosive des colocs Lazare à l’arrivée du monocoque de Tanguy Le Turquais aux couleurs de l’association ! Cette dixième édition est indéniablement marquée par un engouement particulier, une passion française pour la voile et ces aventuriers qui se manifeste de plus en plus, sans compter le succès de Virtual Regatta, la course virtuelle en ligne à laquelle ont participé, cette année, près de 850 000 joueurs, navigateurs en herbe allant jusqu’à se lever la nuit pour virer de bord, changer de voile ou prendre un ris.

Pourquoi le Vendée Globe attire-t-il tant ?

Cet « Everest des mers », avec ses aléas, incarne plus que jamais la prise de risques dans une société où l’on voudrait tout planifier, de la naissance choisie à la mort que l’on souhaiterait prescrire sur ordonnance. Alors que domine le culte de l’immédiateté et de l’efficacité, des colis Amazon aux livraisons Uber Eats, en passant par les dérives de l’intelligence artificielle, cette compétition marquée par le respect mutuel prend son temps et fait front avec l’adversité. Sans compter ces concurrents qui courent pour une bonne cause, faisant de leur traversée en solitaire une course solidaire ! Tanguy Le Turquais, on l’a dit, pour les colocations Lazare, mais aussi Benjamin Ferré pour la réinsertion professionnelle des jeunes issus de l’immigration, ou Violette Dorange, marraine de la Fondation Apprentis d’Auteuil. Elle aura beau ne pas arriver en tête, dans les jours qui viennent, la plus jeune navigatrice du Vendée Globe est devenue la coqueluche du public et des médias. Probablement parce que, à 23 ans, elle incarne le courage et la persévérance, et dépoussière sans arrogance et avec fraîcheur ce sport qui était jusque-là l’apanage des vieux loups de mer. Elle montre surtout aux jeunes générations qu’il faut poursuivre ses rêves, et se donner les moyens de les accomplir, y compris dans l’épreuve. En arrivant aux Sables-d’Olonne en début de semaine, le skipper paralympique né sans main gauche, Damien Seguin, qui s’est baptisé « Capitaine crochet », a résumé en quelques mots l’esprit qui l’avait animé au milieu des nombreuses avaries de la course : « J’avais mille raisons d’abandonner, et j’ai trouvé mille raisons de continuer. » A fortiori pour ceux dont la foi guide les pas et offre un motif supplémentaire, voilà une leçon à ne pas oublier quand, dans nos vies, le soleil vient à manquer et que le grain menace !