Une année de sécheresseCes derniers temps, on parle beaucoup de la sécheresse. Sécheresse d’hiver, précise-t-on, car d’ordinaire la sécheresse survient plutôt l’été, et l’hiver est normalement la saison où les choses s’arrangent : les cours d’eau se rechargent et le sol se détrempe. C’est pourquoi la sécheresse qui sévit en ce moment dans toute une partie de notre pays, essentiellement le sud et le centre, est particulièrement inquiétante. Elle fait peser de lourdes menaces sur les futures récoltes de cette année, sans oublier l’élevage avec des pâtures mises à mal et ne suffisant plus à nourrir le bétail. La pénurie d’eau risque même de toucher les populations et fait craindre des incendies de forêt précoces et dévastateurs.
Dans notre département rural, nous sommes solidaires de tous ceux qui sont touchés, en particulier les agriculteurs et les éleveurs.
Dans la Bible, la sécheresse est souvent présentée comme un châtiment pour le peuple qui s’est détourné de Dieu. On lit par exemple au livre d’Aggée : « J’ai appelé la sécheresse sur la terre, sur les montagnes, sur le blé, le vin nouveau, l’huile fraîche et sur tout ce que produit le sol ; sur les hommes, les bêtes et sur tout le fruit de vos travaux » (1, 11). Au contraire, selon le livre de Jérémie, l’homme qui compte sur le Seigneur sera béni par l’abondance d’eau : « Pareil à un arbre planté au bord de l’eau qui pousse ses racines vers le ruisseau, il ne sent pas venir la chaleur, son feuillage est toujours vert ; une année de sécheresse ne l’inquiète pas, il ne cesse de porter du fruit » (17, 8).
Au chapitre 17 du premier livre des Rois, lorsqu’apparaît le prophète Élie dans le royaume d’Israël qui sacrifie aux idoles, il annonce une grande sécheresse : « Par la vie du Seigneur, le Dieu d’Israël que je sers, il n’y aura ces années-ci ni rosée ni pluie, sinon à ma parole ! » (17, 1). La prophétie se réalise aussitôt, et il faudra attendre qu’Élie ait purifié le pays des prêtres du dieu Baal pour que la pluie revienne enfin sur la terre.
La terre sèche, c’est notre humanité rendue stérile par le péché des hommes. Et la pluie symbolise la bénédiction de Dieu qui va lui rendre sa fécondité spirituelle. Les chants de l’Avent, en particulier le vieux chant Rorate coeli, implorent la descente de la rosée du ciel sur la terre. L’eau du ciel devient ainsi le signe qui concrétise le mystère de l’Incarnation et l’itinéraire de salut du Fils de Dieu fait homme : « La pluie et la neige qui descendent du ciel n’y remontent pas sans avoir arrosé la terre, l’avoir fécondée et fait germer, pour donner la semence au semeur et le pain comestible : de même la parole qui sort de ma bouche ne me revient pas sans résultat, sans avoir fait ce que je voulais et avoir réussi sa mission ». Cet oracle du livre d’Isaïe (55, 10-11), nous les entendrons dans la nuit de Pâques : car alors, la Parole de Dieu qui est le Christ aura pleinement fécondé la terre et réussi sa mission.