
LE POINT DE VUE DE STEPHANE VERNAY - Le "clash" entre Donald Trump et Volodymyr Zelensky à la Maison Blanche a fait réagir, et en particulier les Européens. Alors que le président américain semble se rapprocher de la Russie de Vladimir Poutine, les dirigeants du vieux continent se rassemblent de leur côté.
Vous avez vu des extraits, j'imagine, de l'entretien surréaliste qui s'est tenu vendredi, en direct depuis le bureau ovale entre Volodymyr Zelensky et Donald Trump. Il n'y a pas été question de négocier les conditions d'une paix avec les Russes, ni même d'évoquer les contreparties financières, en minéraux critiques, que l'Ukraine pourrait accorder aux Etats-Unis dans ce "deal", mais bien d'une humiliation publique, infligée en meute et en mondovision du président d'un pays qui se bat pour sa survie depuis trois ans.
La charge, incroyable, a choqué la planète entière, qui découvre que les Etats-Unis de Donald Trump ont embrassé la cause de la Russie de Vladimir Poutine. Il s'agirait, nous expliquent les experts en géostratégie, de "détacher" la Russie de la Chine. Admettons. Mais à quel prix ? Que se passera-t-il, une fois l'Ukraine sacrifiée sur l'autel des intérêts américains ? Quels seront les cibles suivantes de Vladimir Poutine ? La Moldavie ? Les Etats Baltes ? La Pologne ? La Finlande ? Et qu'est-ce qui empêchera Donald Trump de faire main basse sur les cibles qu'il a, lui, déjà désignées, comme le Canada ou le Groenland ?
L'heure est grave, nous sommes en train de changer de monde. Le président Macron a dit à plusieurs reprises que la Russie constitue « une menace existentielle pour l’Europe ». Depuis vendredi, on est en droit de se demander si les Etats-Unis ne le sont pas devenus aussi. Samedi, le Chef de l’Etat, qui veut croire que les Américains resteront nos alliés malgré tout, a eu cette formule : "Il est minuit moins le quart mais nous avons encore la main". Autrement dit, nous sommes proche du point de rupture, mais nous pouvons - encore sauver l'Ukraine et nous préserver de la guerre.
Les européens essaient de montrer qu'une coalition militaire puissante peut se mobiliser en faveur de l'Ukraine, sans les Américains. La réunion de Londres, ce dimanche, avait cet objectif. Elle a permis à la France et à la Grande-Bretagne, deux puissances dotées d'un arsenal nucléaire autonome, d'afficher leur unité. Mais il est particulièrement intéressant de constater que des pays comme la Norvège, la Turquie ou le Canada, qui disposent de ressources et de capacités militaires, étaient présents aux côtés des chefs de gouvernement des grands Etats-membres de l'Union européenne. Cet alignement rend crédible l'envoi d'une troupe multinationale d'interposition en Ukraine pour garantir le respect d'un futur cessez-le-feu.
La trêve d'un mois proposée par les Français et les Britanniques pour négocier une paix qui ne soit pas une capitulation pure et simple de l'Ukraine prend tout son sens dans ce cadre.
L'autre réunion qui peut faire bouger les lignes, et qu'il faudra suivre avec attention, est celle de jeudi prochain, 6 mars, jour de la tenue d'un conseil européen exceptionnel à Bruxelles. Il y sera question des moyens financiers que l'Union Européenne est en mesure de débloquer pour financer le réarmement de l'Europe. Emmanuel Macron a fait savoir hier qu'il faudrait que chacun des Etats-membres consacre 3 à 3,5% de son Produit intérieur brut à la défense. Pour certains, c'est beaucoup, ça ne se fera pas du jour au lendemain, mais cet engagement est plus que nécessaire. Il en va de la sécurité du continent, qui ne peut plus compter désormais que sur lui-même.
Des chroniqueurs d'horizons variés nous livrent leur regard sur l'actualité chaque matin à 7h20, dans la matinale.
- Le lundi : Stéphane Vernay, directeur de la rédaction de Ouest-France à Paris, et Arnaud Benedetti, rédacteur en chef de La revue politique et parlementaire ;
- Le mardi : Corinne Bitaud, agronome et théologienne protestante, et Marie-Hélène Lafage, consultante en transition écologique auprès des collectivités territoriales ;
- Le mercredi : Clotilde Brossollet, éditrice, et Pierre Durieux, essayiste ;
- Le jeudi : Antoine-Marie Izoard, directeur de la rédaction de Famille chrétienne ; Aymeric Christensen, directeur de la rédaction de La Vie ;
- Le vendredi : Blanche Streb, essayiste, chroniqueuse, docteur en pharmacie, auteure de "Grâce à l’émerveillement" (éd. Salvator, 2023), "Éclats de vie" (éd. Emmanuel, 2019) et "Bébés sur mesure - Le monde des meilleurs" (éd. Artège, 2018), et Elisabeth Walbaum, Déléguée à la vie spirituelle à la Fédération de l'Entraide Protestante.
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