Clémentine Biano
" Un éclat rouge " (Calmann-Lévy)
Dans ce village français des années 1950, le monde de Jeannot, 9 ans, s'écroule le jour où sa désobéissance provoque un accident fatal pour son petit frère.
Les parents lui imposent le silence et inventent pour les gendarmes un rôdeur responsable du drame. De peur que la vérité ne lui échappe, Jeannot devient muet.
Entouré de l'affection de sa grand-mère, il oscille entre isolement et culpabilité.
Un jour, une fillette de son âge s'installe au village. Elle n'a pas peur des mots et parle pour eux deux. Se pourrait-il qu'un jour, la vie reprenne un cours heureux ?
La chronique de Jacques Plaine
CLÉMENTINE BIANO Un éclat rouge Calmann Lévy Clémentine Biano originaire de Saint Galmier – rédactrice indépendante – a écrit sa première histoire à cinq ans sur une machine à écrire offerte par ses parents. « Un éclat rouge » est son premier roman. Dans une cour de ferme, le 10 août 1957, un enfant de trois ans est retrouvé mort, écrasé sous une voiture. La belle voiture rouge de papa. Que s’est-il passé ? Un meurtre ? Un accident ? Va savoir. Au village c’est la consternation, on parle, on cause, on jase, « on s’étonne, on s’étonne ». Les parents racontent aux gendarmes que c’est un « homme vêtu d’un pantalon noir, d’un béret et d’un veste foncée » qui a fait le coup et le journal local de titrer « Le tueur d’enfant toujours en fuite » expliquant que « le seul témoin, le frère de la victime, âgé de neuf ans, n’a pu fournir qu’une description vague du criminel ». Or Jeannot le frère de la petite victime n’a rien fourni du tout. Pourquoi ? Parce que c’est lui qui était dans la voiture de papa, lui qui a mis le moteur en marche, lui qui s’est pris les pieds dans les pédales. « C’est moi » a-t-il expié dans un sanglot. Et ce sont ses parents, oui ses parents, qui ont inventé l’histoire de la voiture arrêtée, portière ouverte et de « l’homme qui s’enfuyait par la route, vers le bois ». Pourquoi ce mensonge ? Pour protéger Jeannot dira la mère : « Imagine le scandale dans le village, si on sait que c’est lui ! Il en entendra parler toute sa vie, ses enfants aussi, et même ses petits enfants ». En entendant ses parents raconter aux gendarmes cette salade, les mots de Jeannot se sont serrés dans sa gorge « comme un fagot de bois mort ». Depuis il est muet. Les mots l’ont quitté « pour un pays dont il ignore tout ». Obligé d’écrire sur une ardoise qu’il brandit au dessus de sa tête. Ou sur un carnet. Sa mère lui en a accroché un autour du cou. « Merci Maman » s’est-il empressé d’écrire. Commence alors la descente aux enfers. Jeannot découvre que ses parents s’éloignent l’un de l’autre et vivent encore plus mal que lui la mort du petit frère. Le soir ses oreilles traînent derrière les portes. Il a entendu sa mère crier « faut que ça cesse ou que ça pète » et son père hurler « Je ne veux plus le voir… moins on le verra, mieux on se portera ». Et puis un jour une gamine arrive au village. Elle a son âge, vient de Paris, s’appelle Charlotte et n’a pas sa langue dans sa poche : « Alors c’est toi le muet ? ».
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