Le président américain met ses menaces à exécution : commerciales, humanitaires et maintenant militaires. Des droits de douanes indifférenciés de 25 % sur chaque produit provenant de l'Union européenne, des coupes drastiques dans les financements de l'agence de développement USAID, et maintenant cette suspension de l'aide militaire américaine en Ukraine. Le point sur les répercussions en région lyonnaise.
L’annonce était attendue, mais peut-être pas de cette ampleur. Donald Trump a, dans un premier temps, annoncé l’instauration indifférenciée de droits de douanes sur tous les produits provenant de l’Union européenne. Une taxe qui rappelle de mauvais souvenirs aux vignerons de notre territoire.
Les vins du Beaujolais, mais aussi du Nord-Isère, avaient subi les conséquences d’une première « taxe Trump », instaurée en 2019 sous sa première présidence : 25 % sur les vins de moins de 14 degrés d’alcool. Stéphane Ogier, vigneron de Côte-Rôtie, se souvient très bien de cette période qui a impacté le premier marché d’exportation de son domaine, situé à Ampuis depuis sept générations :
J'étais inquiet sans trop l'être non plus, on essaye de répartir nos ventes […] on ne voulait pas perdre nos marchés aux États-Unis, mais on était rassurés parce qu’on savait que ce qu’on ne vendait pas là, on pouvait le vendre ailleurs.
Autre problématique : la logique de la taxe d'alors, imposée en France mais pas en Italie, mais aussi sur les vins, et pas sur les champagnes : « aucune logique » selon Stéphane Ogier, même si les exportations ont continué, du fait d’un pourcentage d’alcool qui dépassait parfois à cette époque la barre des 14 degrés à cause du réchauffement globale des températures, et qui a permis aux volumes d’exportations de se maintenir pendant la période de la taxe pour le domaine Ogier. Avec cette nouvelle mouture de la taxe Trump, indifférenciée, et avec des volumes d'alcools revenus dans des valeurs normales, la donne pourrait être différente.
La mesure peut inquiéter plus fortement d’autres secteurs exportateurs vers les USA : l'industrie pharmaceutique, par exemple, secteur historiquement implanté dans le territoire de la région lyonnaise. Avec 260 entreprises pharmaceutiques implantées, Lyon constitue le deuxième site de cette industrie en France : ces produits représentent le deuxième poste d’exportation français vers les États-Unis.
Professeur de sciences économiques et sociales, le Lyonnais Emmanuel Buisson-Fenet entrevoit des conséquences à long terme pour le secteur, représenté en région lyonnaise par des grandes entreprises comme Boiron ou Sanofi :
Ces grands groupes sont déjà dans une logique d’internationalisation, et ont pour la plupart déjà des unités de production aux États-Unis. En revanche, à long terme, si on entre dans un monde où la taxe à 25 % est généralisée par les États-Unis […], il pourrait y avoir un mouvement de délocalisation-relocalisation.
Un mouvement qui menacerait à long terme les emplois de la région, autant dans le secteur pharmaceutique que dans le secteur industriel de manière global.
Dans le même temps, le secrétaire d'état américain, Marco Rubio, a décidé de mettre fin à près de 5 800 des financements de programmes accordés dans le monde par l'agence américaine de développement, soit 92 % des financements de l'USAID, ainsi qu'à 4 100 subventions.
Une mesure qui a touché directement l’association de solidarité internationale lyonnaise Triangle Génération Humanitaire : la structure œuvre notamment en Ukraine et au Soudan, dans plusieurs domaines comme l’aide juridique, la sécurité alimentaire, l’hygiène et l’accès à l’eau. « On vient de perdre 25 % de notre budget annuel (…) sachant que ce financement était directement mis en œuvre sur le terrain. Environ 5 millions d’euros » déplore son directeur des opérations André Duchêne.
Une coupe nette dans les financements, qui annule de futurs projets, mais contraint aussi à abandonner totalement certains projets déjà en cours. Cet arrêt soudain des financements américains et l’arrêt des activités de Triangle concerne 12 000 personnes en Ukraine, et 150 000 au Soudan.
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