
Nouvelle-Aquitaine
La Fédération des Associations Générales Étudiantes, la FAGE présente un « Baromètre de la précarité étudiante ». L’enquête est faite auprès de plusieurs centaines de bénéficiaires des AGORAé, les épiceries sociales et solidaires dont bénéficies des milliers de jeunes au quotidien. Pour bien comprendre les difficultés auxquelles sont confrontés les étudiants précaires aujourd’hui, Cécile Mérieux reçoit Maëlle Nizan, présidente de la Fage.
La précarité touche de plus en plus d'étudiants au point de devenir quelque chose de normal. Lorsque l'on est étudiant, on mange des pâtes, on saute des repas, c'est quelque chose qui est presque banalisé. Cela ne doit pas être la normalité. Pour tenter d'y remédier, la FAGE, la Fédération des associations générales étudiantes a mis en place des Agorae. Ce sont des épiceries sociales et solidaires du réseau de la Flèche, par les jeunes et pour les jeunes. Elles sont réparties sur 31 villes universitaires, donc ça concerne vraiment l'ensemble du territoire français. Ce sont donc des étudiants qui vont directement s'engager pour réussir à répondre aux besoins des autres étudiants. La particularité est qu'au delà d'être une épicerie c'est aussi un lieu de vie où on va lutter contre l'isolement social qui augmente depuis la crise Covid-19. Pour la FAGE, cela est vraiment essentiel de pouvoir lier ces deux actions et que ce soit vraiment par les pairs. Néanmoins, la précarité augmente et de nombreux étudiants ne mangent plus qu'un seul repas par jour. 70% d'entre eux, n'ont pas du tout accès aux bourses étudiantes ou aux bourses sur critères sociaux du CROUS. Cela témoigne du fait que le système d'aide sociale n'arrive aujourd'hui plus à toucher sa cible, qui n'arrive plus à toucher l'ensemble des étudiants précaires. Derrière tous ces chiffres, derrière, ce sont des étudiants qui n'arrivent pas à manger, qui n'arrivent pas à se loger, ce qui pour la FAGE n'est pas tolérable.
Le problème, est que notre système, est très ancien. Les barèmes n'ont pas été revus, notamment avec l'inflation. Celle-ci a fait que les salaires ont augmenté, le SMIC a augmenté, sauf qu'aujourd'hui, les bourses, sont calculées sur les revenus des parents. Il y a donc un effet d'éviction qui fait qu'il y a des étudiants qui sont sortis du système de bourse. Aujourd'hui, proportionnellement, le système a de moins en moins d'étudiants boursiers qu'il pouvait avoir, par exemple, il y a 10 ans. Il y a donc des étudiants de classe moyenne, de classe moyenne basse, qui ne rentrent pas dans le système de bourse, mais dont les parents n'ont pas non plus la possibilité de les aider suffisamment pour subvenir à leurs besoins. On remarque une forte inégalité des coûts selon les régions. Comme par exemple entre l'Île-de-France et Poitiers, entre des villes plutôt de province et des villes plutôt comme en Île-de-France, où on a vraiment un coût de la vie, notamment un coût de loyer qui est extrêmement cher. La FAGE demande donc du côté de la Flèche que le système de bourse soit aussi une bourse territorialisée en fonction du bassin de vie.
Dans le porte-monnaie d'un étudiant, le premier poste de dépense est le logement. Toutes les autres dépenses comme l'alimentation, l'accès aux soins, vont être des variables d'ajustement. Parce qu'une fois qu'on a déboursé son logement, et qu'on est obligé de payer le reste on va devoir économiser. Dans l'alimentation par exemple, il y a de nombreux sauts de repas chaque semaine ou encore l'accès aux soins. On se rend compte que 40% de nos bénéficiaires renoncent aux soins, ce qui remet en cause leurs conditions de santé.
La précarité, va aussi les pousser à avoir un emploi étudiant à côté ce qui va remettre en cause leur réussite académique, l'égalité des chances. Aujourd'hui, 41% des étudiants se salarient. La proportion est donc en hausse. On se rend compte que ce sont des emplois qui prennent de plus en plus de temps. 71% de nos bénéficiaires nous disent qu'ils ressentent un impact négatif sur leur réussite quand ils sont salariés. Il y a donc, un impact globalement négatif sur leurs conditions de vie.
Ce n'est pas tolérable de se dire qu'aujourd'hui on va remettre en cause notre réussite académique en salariant pour juste pouvoir manger et se loger et que si on le fait pas.
L'enquête de satisfaction réalisée par la FAGE met en avant le fait que lorsque l'on est précaire, lorsque l'on ne sait pas comment on va manger, que l'on a du mal à joindre les deux bouts, forcément l'anxiété augmente. Cela va avoir un impact direct sur notre santé mentale et qui ne vont pas mettre les étudiants dans des conditions décentes. Les questions de santé mentale sont la grande cause nationale que l'on traite par du curatif. On met en place de l'accès au psy, des chèques psy qui sont des mesures nécessaires, mais qui à elles seules ne peuvent pas suffire. Tant que l'on ne traitera pas les causes des problématiques de santé mentale, tant qu'on ne se demandera pas pourquoi les jeunes vont mal et qui sont anxieux juste on ne pourra pas réussir à correctement répondre à ces problématiques.
Le Covid-19 a notamment eu un impact direct sur la santé mentale des étudiants. Il a aussi pu mettre en lumière une précarité étudiante qui datait d'avant et auquel on n'a toujours pas de réponse.
Pour y remédier, nous demandons une réforme systémique du système de bourse étudiante qui, selon les chiffres ne répond plus aux besoins. Trop d'étudiants passent entre les mailles du filet et ce n'est pas l'objectif d'un système de base d'aide sociale. Il doit permettre aux jeunes de se nourrir, aux jeunes de se loger, aux jeunes de vivre dans des conditions dignes ce qui n'est aujourd'hui, plus le cas. La réforme systémique des bourses, avait été annoncée dès le premier mandat d'Emmanuel Macron en 2017 mais n'a toujours pas vu le jour dont on voit aujourd'hui les conséquences concrètes sur le territoire.
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