A la tête du Directoire du Grand Port Maritime depuis le mois de mai, Sandrine Gourlet revient pour RCF sur l'année 2024 et détaille les perspectives des mois à venir.
Ingénieure générale des Ponts, des Eaux et des Forêts, Sandrine Gourlet est devenue à 52 ans la présidente du Directoire du Grand Port Maritime de La Rochelle, sixième au niveau français en termes de tonnage. Après une année 2024 marquée par une légère baisse du trafic, la haut-fonctionnaire revient pour RCF sur les enjeux des mois à venir et détaille le fonctionnement du Grand Port Maritime. Avec, en toile de fond, le projet Aquitania Wind Energy.
RCF : Quel bilan peut-on tirer de l’activité du port en 2024 ?
Sandrine Gourlet : Le chiffre que tout le monde attend généralement, c’est le trafic. Ce qu’on peut dire, c’est qu’en 2024 il a été équivalent à 2023. Mais ce qui m’intéresse, c’est l’évolution de la valeur du trafic. En 2024, on a notamment eu des colis lourds, en l’occurrence des pièces d’éoliennes pour le champ de Noirmoutier, qui ont représenté une part importante du trafic.
Nos principaux trafics sont des produits pétroliers raffinés, c’est-à-dire du gasoil et de l’essence, et des céréales. Compte tenu des conditions météorologiques, la campagne céréalière n’a pas été aussi brillante que les années précédentes, mais cela a été compensé par d’autres trafics.
Un élément que je trouve intéressant, c’est le trafic de pâte à papier. C’est un trafic qui n’est pas très important, mais qui a fortement cru en 2024. La pâte à papier est utilisée pour faire des cartons d’emballage, ce qui veut dire qu’on en fait davantage que d’emballages plastique. C’est une belle traduction des changements de comportement sur le plan écologique.
RCF : Pourquoi ce trafic de pâte à papier circule particulièrement par le port de La Rochelle ?
Déjà, on a la capacité d’accueillir ces navires. Ensuite, vous avez des filières logistiques qui permettent de l’emporter vers des outils industriels pour la transformer en carton. Le port n’est toujours qu’un morceau d’une chaîne logistique.
RCF : Et c’est votre tâche de vous rendre le plus attractif possible pour intégrer ces chaînes logistiques ?
Tout à fait. Nous avons certains types de trafic qui sont davantage orientés vers le port de La Rochelle, parce que cela nécessite des installations ou parce que cela vient desservir des industries. Les céréales sont par exemple exportées depuis des ports où il y a des silos céréaliers, ce qui est le cas de La Rochelle. Même chose pour les trafics pétroliers, ils ne peuvent pas aller n’importe où.
Le port de La Rochelle a un certain nombre de qualités, notamment d’être en eaux profonde et d’être accessible 24h sur 24, 365 jours par an. On n’est pas tributaires de la marée et on a des conditions nautiques qui sont extrêmement favorables ; on a très peu de jours d’inaccessibilité en raison des tempêtes, puisqu’on est protégés par les îles, dans les pertuis. C’est un port qui présente beaucoup d’intérêts pour un certain nombre d’acteurs logistiques.
RCF : En termes d’équipes, combien de personnes représente aujourd’hui le port de La Rochelle ?
Concernant les équipes du Grand Port Maritime, qui est le chef d’orchestre du port, nous sommes 113. Il faut le distinguer des entreprises qui travaillent sur la place portuaire et autour de celle-ci : une étude a montré que l’emploi direct, indirect et induit de la place portuaire était de 4 700 personnes à l’échelle de l’agglomération et représentait 1,5 milliard d’euros de chiffre d’affaires. C’est un acteur économique extrêmement important pour le territoire.
RCF : Pour maintenir ce statut, il faut réaliser des investissements ; quels sont les grands projets que vous avez pu mener en 2024 et que vous allez mener en 2025 ?
On a réalisé en 2024 à peu près 40 millions d’investissements et on prévoit des investissements du même ordre pour 2025, [37 millions d’euros, NDLR]. Il faut savoir que pour accompagner ces investissements publics, les entreprises de la place portuaire investissent environ le même montant : à peu près 40 millions en 2025 et 45 millions en 2024. Ce qui est beaucoup plus que ces dernières années, parce qu’on est dans une phase de réalisation de projets : on a des bateaux beaucoup plus grands et donc il faut continuer à adapter nos infrastructures. Nous devons aussi maintenir notre patrimoine.
RCF : Il y a un autre projet important en cours : l’Aquitania Wind Energy. En quoi consiste-t-il exactement ?
C’est un projet porté par les quatre ports de la région : La Rochelle, Bordeaux, Rochefort-Tonnay-Charente et Bayonne. Il vise à continuer à adapter les ports pour les futurs projets éoliens en mer : on a des projets éoliens qui ne sont pas loin du port de La Rochelle, derrière l’île d’Oléron, et donc on se positionne pour être les acteurs logistiques de ces champs éoliens. Pour arriver à faire cela, il faut qu’on adapte nos ports pour faciliter la construction que les industriels vont réaliser.
L’Etat a choisi de faire un appel à projets ; on a déposé un dossier auprès de l’ADEME [l’Agence de la transition écologique] pour demander des cofinancements de l’Etat afin de continuer à nous développer et à nous adapter. L’idée est d’avoir des retombées économiques locales d’une activité qui va se faire quasiment sous nos yeux. On trouvait cela pertinent et intéressant de pouvoir capter cette valeur de ces projets et en faire bénéficier aussi bien le territoire que les entreprises du territoire. On aura une réponse à l’automne, alors que La Rochelle accueille les Assises de l’Economie de la Mer début novembre, qui vont permettre de rassembler tous les acteurs de l’économie marine.
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